mardi 10 mai 2011

Interview de notre sound designer

Pour parler de l’ambiance sonore de notre jeu iPad qui de mieux placé que notre Sound designer, Sylvain Jannot, compositeur de son état ?!

Voilà donc une séance de questions en bonne et due forme qui s’impose…

Pour bien commencer, puisque nous savons qu’un sound designer ne naît pas d’une partition, quel fut ton parcours avant de te retrouver à l’Enjmin ?
Un bac littéraire en poche, j’ai fait une licence de musicologie à Montpellier puis un master I où j’ai pu notamment m’exercer à la composition avec Jean-Claude Wolff et me plonger dans la recherche avec Makis Solomos.

Et pourquoi intégrer cette école orientée jeux vidéo et média interactifs ?
Il y avait deux raisons à cela. D’abord parce que j‘avais effectué un stage de conception sonore à l’Enjmin l’année d’avant qui m’avait convaincu. De plus, dans le milieu des loisirs numériques on trouve des débouchés plus facilement, même si cela reste hasardeux.
Ensuite parce que c’est aussi une occasion pour moi de découvrir et d’approfondir un nouveau domaine qui tranche avec mes précédentes conceptions linéaires de la musique. Dans le jeu vidéo vous n’avez pas de début ni de fin prévisible comme dans un film, il faut se concentrer sur les comportements du joueur. Il s’agit d’anticiper tous les comportements possibles et de faire varier les sons et la musique en fonction. Cela exige de trouver des astuces, de développer de nouveaux outils, de nouvelles méthodes et surtout d’avoir un esprit ouvert aux nouvelles technologies.


Lors de la présentation des projets de première année qu’est ce qui t’a attiré dans le projet Michel ?
Me concernant ce fut l’idée de faire coopérer un enfant avec un adulte. Jouer avec des touts-petits c’est toujours intéressant. On se replonge dans notre propre enfance, on profite de leur vision simple et lucide des choses, loin des considérations adultes. Et puis avec eux l’amusement est nécessairement à double sens. Choisir la plateforme iPad fut également un critère de choix. Compte tenu de ses limitations sonores au niveau des haut-parleurs il y avait un véritable intérêt pour moi à relever ce défi technique.

En quoi consiste ton travail plus précisément ?
Tout d’abord je dois m’adapter aux caractéristiques techniques spécifiques du support et ensuite je dois proposer un univers sonore cohérent. Pour ce faire, l’équipe et moi avons décidé de nous orienter vers des bruitages réalistes ainsi qu’une musique légère tout en faisant passer du sens. Il faut faire attention à tenir en haleine le double public du jeu ce qui peut comporter quelques paradoxes... Enfin, j’espère aussi poser mon empreinte dans mes ambiances. En clair, fournir un enrobage plaisant qui puisse me satisfaire.

Qu’est-ce qui a pu te marquer dans ta vie de compositeur et qui nourrit aujourd’hui ton imagination ?
Dans le cadre du projet je suis parti des considérations techniques des haut-parleurs de l’iPad (minuscules donc bande passante de fréquence basse-médium-aigu très restreinte) ainsi que de l’histoire (celle d’un petit garçon qui veut devenir grand) pour réfléchir à un univers sonore. J’ai choisi de m’orienter vers une formation instrumentale volontairement épurée et limitée, avec de petits ensembles : piano, harpe, violoncelle et alto. Cela complique d’autant plus la tache qu’il n’est pas aisé d’écriture pour ce type d’ensemble et d’obtenir une richesse d’écriture. Tout réside dans la subtilité. Pour illustrer toute l’ironie et le paradoxe de ce genre de processus, Jean-Sébastien Bach avait le mot juste : “Il est facile de jouer de n’importe quel instrument : tout ce que vous avez à faire, c’est de jouer la bonne note au bon moment.”
Mes inspirations sur ce sujet ont été les musiques ethniques, et les chants d’enfants dans ce qu’elles ont de plus universel au monde (échelles tritonique et pentatonique que l’on retrouve dans les comptines). Des musiques qu’on puisse fredonner en somme. Pour le reste j’enrichis les choses de ma personnalité, ma culture : Ravel, Debussy, Korn, etc. Bref, des musiques d’ambiance !


Pour finir, quelques conseils pour les sound designers qui voudraient suivre ton exemple ?
Je commencerai en vous donnant ma définition de ce qu’est un sound designer ou concepteur sonore, un terme souvent pas très simple à appréhender du fait qu’il s’inscrit dans une industrie encore jeune dans laquelle de nouveaux métiers naissent. Pour citer Christophe Héral, un compositeur dont je respecte profondément le travail (à l’origine des bandes son des jeux Beyond Good and Evil, bientôt Rayman Origins et aussi Tintin, sans oublier plusieurs courts et longs métrages), le sound designer est un “compositeur de musiques et de sons”. C’est son ambivalence qui le caractérise. En effet, derrière ce terme souvent flou peut être assimilé : compositeur, monteur-son, bruiteur… Des personnes qui manipulent et transforment des sons. On retrouve une dimension réellement contemporaine au sens musical dans le fait que c’est un métier qui se base plus sur le son que sur la musique.
Pour ce qui est des conseils à proprement parler, je ne cesserai jamais de répéter ce qui fait ma règle de vie : emmagasiner, discuter, expérimenter, se construire une culture, être curieux, savoir écouter… Des attitudes faciles à adopter et qui change un regard et surtout… une oreille !


Mon cher Sylvain ce fut un réel plaisir et je te remercie pour le temps accordé à la compréhension de ton art subtil et délicat !
Mais tout le plaisir a été pour moi ma chère Pascaline !

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